L’ÉTAU SE RESSERRE SUR LES COOPÉRATIVES
Dans un contexte de montée en flèche des prix du cacao sur le marché mondial, les coopératives locales de production se retrouvent sous une pression croissante. À Ntoum, une petite ville à une quarantaine de kilomètres de Libreville, où la culture du cacao est l’une des principales activités rémunératrice de revenus, la situation est particulièrement critique. La coopérative locale, qui regroupe 500 producteurs, lutte pour survivre dans un environnement où les géants de l'industrie semblent prospérer.
Les producteurs de cacao de Ntoum, comme beaucoup d'autres à travers le monde, font face à des coûts de production qui augmentent plus vite que leurs revenus. L'engrais, les pesticides et même le transport deviennent de plus en plus onéreux, accentuant la vulnérabilité des petites coopératives. De plus, la capacité de ces coopératives à négocier des prix compétitifs est minée par la concurrence féroce des multinationales qui contrôlent une grande partie de la chaîne d'approvisionnement.
Les grandes entreprises ont la capacité d'absorber l'augmentation des coûts grâce à leur puissance financière et leur intégration verticale, ce qui leur permet de maintenir leur rentabilité. Les coopératives, quant à elles, se retrouvent piégées entre la nécessité de soutenir leurs membres et l'incapacité de rivaliser avec les prix offerts par les industriels.
La pression sur les coopératives se traduit par un phénomène inquiétant : les petits producteurs quittent ces structures pour se tourner vers des acheteurs individuels ou des contrats directs plus avantageux proposés par les grands groupes. Ce mouvement affaiblit les coopératives, déjà précaires, en réduisant leur volume de production et en limitant leur pouvoir de négociation.
Selon Koffi Mbala, président de la coopérative de Ntoum,
"c’est un cercle vicieux. Quand un producteur part, c’est une perte pour nous tous, car cela diminue notre poids face aux acheteurs et complique notre gestion collective"
Les experts et les défenseurs des petits producteurs appellent à la mise en place de mesures de soutien pour ces structures locales. Ces mesures pourraient inclure des subventions gouvernementales, des programmes de formation pour améliorer la productivité et la qualité des récoltes, ou encore des initiatives de commerce équitable qui garantissent un revenu minimum aux agriculteurs.
"Sans un soutien réel et structurel, les coopératives risquent de disparaître, laissant place à un monopole accru des multinationales", souligne un économiste spécialisé dans le secteur agricole. Cette perspective pose des questions sur la durabilité de la filière cacao, tant pour les économies locales que pour l'équilibre du marché global.
La disparition potentielle des coopératives locales aurait des conséquences profondes sur le tissu social et économique des régions productrices de cacao. Ces coopératives ne se contentent pas de vendre le cacao, elles sont aussi des vecteurs de développement, contribuant à l’éducation, à la santé et à d'autres projets communautaires.
La situation à Ntoum est emblématique d’une lutte plus large que mènent de nombreuses coopératives en Afrique et ailleurs, face aux défis de la mondialisation et des fluctuations des prix des matières premières. Alors que la demande mondiale de chocolat continue de croître, il devient impératif de réfléchir à des solutions durables qui garantissent la pérennité de tous les acteurs, et pas seulement des plus puissants.
Des programmes de commerce équitable renforcés, une aide publique accrue et la promotion de chaînes d'approvisionnement locales et diversifiées pourraient être des pistes pour redonner espoir à des milliers de petits producteurs de cacao.