GONDJOUT DÉNONCE LA DÉLINQUANCE JUDICIAIRE DES MAGISTRATS

Paul Marie Gondjout, ministre gabonais de la Justice et garde des sceaux, a pris la parole ce 21 janvier 2025, à l’occasion d’un atelier de réflexion sur l’organisation et le fonctionnement des services judiciaires. Il a exposé les défis actuels auxquels fait face la justice gabonaise, tout en réaffirmant l’engagement du gouvernement à œuvrer pour une justice plus efficace et plus équitable.
"Depuis le 30 août 2023, notre pays écrit une nouvelle page de son histoire"
a d’emblée rappelé Paul Marie Gondjout, faisant référence à l’instauration de la transition politique sous la direction du général Brice Clotaire Oligui Nguema.
"La justice figure au nombre des institutions à restaurer"
a souligné le ministre Paul Marie Gondjout, en insistant sur la nécessité de renforcer les capacités des acteurs judiciaires gabonais. À cet effet, un premier symposium sur le système judiciaire a eu lieu en novembre 2023 à Libreville, permettant de dresser un diagnostic sans complaisance des maux qui affectent la justice gabonaise. Cette initiative s’inscrit dans une volonté de réformer un secteur miné par des dysfonctionnements multiples et graves.
Les défis auxquels fait face la justice gabonaise sont nombreux, selon le ministre.
"Les dysfonctionnements dont souffre notre justice sont à la fois graves et multiformes"
a-t-il affirmé. Il a souligné que ces problèmes nécessitent une action collective pour les corriger. Parmi les maux dénoncés, le ministre Paul Marie Gondjout a évoqué la délinquance judiciaire, la galvaudisation des valeurs essentielles du métier de magistrat telles que l’éthique et le professionnalisme, ainsi que l’emprise des revendications matérielles sur la quête d’une justice plus fiable et plus juste.
Il a également pointé du doigt les incohérences de certaines pratiques judiciaires, notamment les délais excessivement longs dans le traitement des affaires et les détentions prolongées sans justification légale.
"Est-il conforme à la loi qu'une personne qui a purgé sa peine continue de garder prison plusieurs jours, voire des mois ou des années après ? Est-il conforme à la loi qu'une personne qui a purgé sa peine continue de garder prison plusieurs jours voir des mois ou des années après ?Est-il conforme à la loi qu'une personne soit en détention preventive au-delà du délai légal sans décision judiciaire ?
Est-il conforme à la loi qu'une procédure de référer dure des années ?
Est-il toujours conforme à la loi qu'une procédure abrégé soit traitée comme une procédure ordinaire ?
Est-il conforme à la loi que les procédures de flagrance soient traités comme des procédures ordinaires ?
Est-il conforme à la loi Mesdames et Messieurs que les dossiers relatifs à l'état des personnes et au succession malgré leur sensibilité demeurent sans réponse de la justice pendant plusieurs mois voir plusieurs années?
Qu'est-ce qui explique la durée excessivement longue des procédures collectives d'apurement du passif ?
Pourquoi le faible taux d'exécution des peines d'amendes ?
Comment expliquer les lenteurs observés dans la mise à disposition des copies et exposition de jugement au parti?
Comment comprendre la disparition des dossiers et l'absence de leurs traces dans les registres institués par la loi ?
Est-il normal que des jugements soient rendus à l'insu des partis pour leurs priver de voies de recours prévues par la loi ?
Est-il normal qu'une procédure puisse obtenir d'une même juridiction pour un même motif un nombre de renvois qui couvre une année judiciaire ?
Est-il conforme à la loi que des recours formés ne soient pas transmis à la juridiction compétente plusieurs mois voire des années plus tard ?
Est-il conforme à la loi que les délibérés ne soit pas vidés aux dates indiquées aux partis ni même prorogés ?
Est-il conforme à la loi que les décisions prises en cours de délibéré soit altérés unilatéralement par un membre du collège délibérant ?
Est-il encore conforme à la loi que le nom d'un magistrat qui n'a pas assisté au début et à la délibération puisse figurer sur le jugement ?
Est-il conforme à la loi est-il normal que les magistrats du siège puissent à l'insu de leurs collègues se rendre dans des commissariats ou brigades de gendarmerie pour poser des actes de trafic d'influence ?
" a-t-il interrogé, en insistant sur la nécessité de réparer ces dysfonctionnements.
"La justice est faite par et pour les équilibres"
a poursuivi Paul Marie Gondjout. Il a souligné l’importance de maintenir une séparation claire des pouvoirs au sein de l’appareil judiciaire. Cette indépendance, consacrée par la nouvelle Constitution gabonaise du 19 décembre 2024, doit permettre une meilleure administration de la justice tout en respectant la loi.
Cependant, le ministre a reconnu que malgré les réformes légales, la mise en œuvre reste insuffisante.
"Les mots qui minent la justice relèvent de plusieurs problématiques"
a-t-il précisé. Il a mentionné les enjeux aussi divers que la condition des personnels judiciaires, le cadre de travail et la formation des agents.
Face à cette situation, le ministre a insisté sur la nécessité d’agir de manière concertée.
"La réponse des pouvoirs publics à ces problématiques ne saurait ni être instantanément complète ni être indéfiniment reportée"
a-t-il affirmé.
Il a appelé à une approche méthodique pour résoudre ces maux. Dans cette optique, des efforts importants sont en cours, notamment dans le domaine des infrastructures judiciaires, avec la construction de nouveaux tribunaux et la réhabilitation des infrastructures existantes.
"Il est inacceptable de rester insensible face à cette triste réalité", a conclu le ministre, appelant chaque acteur du système judiciaire à prendre ses responsabilités pour garantir l’efficacité et la transparence des services judiciaires. Ce discours met en lumière la volonté des autorités gabonaises de restaurer la confiance du public dans la justice, en mettant l'accent sur la lutte contre la corruption et les pratiques déviantes.