BLANCHIMENT D'ARGENT: IL SORT DE LA LISTE GRISE
Le 25 octobre 2024, le Groupe d'actions financières (GAFI) a annoncé le retrait du Sénégal de sa « liste grise » pour ses efforts significatifs dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Cette sortie marque une avancée cruciale pour le pays, trois ans après avoir été placée sous « surveillance renforcée » en raison de « défaillances stratégiques » dans son système de prévention des flux financiers illicites.
En 2021, le Sénégal avait été épinglé par le GAFI pour des insuffisances dans les secteurs de la construction, de l’immobilier, des jeux de hasard, et des professions juridiques, telles que les notaires et avocats. Le gouvernement sénégalais a depuis mis en œuvre les 49 recommandations du GAFI, culminant avec l'adoption d'une loi en février 2024 visant à combler les lacunes de la législation précédente. « Cette loi vise à assurer une meilleure traçabilité des fonds suspects, en limitant les prête-noms et en introduisant des sanctions plus sévères contre les institutions négligentes », précise Moussa Sylla, spécialiste de la lutte contre le blanchiment d'argent.
Le Sénégal a également créé en avril 2022 l'Office national des recouvrements des avoirs criminels (ONRAC), permettant la confiscation et la vente aux enchères des fonds d'origine douteuse, un outil destiné à priver les criminels des bénéfices de leurs actes. En parallèle, le gouvernement a intensifié la formation des agents chargés d’appliquer ces mesures, contribuant à une hausse de 145 % des déclarations d'activités suspectes en 2023, selon la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF).
Le retrait du Sénégal de la « liste grise » redore l’image du pays aux yeux des investisseurs internationaux, érodée par trois années de surveillance du GAFI. Magaye Gaye, économiste et ancien cadre de la Banque ouest-africaine de développement, souligne : « Cela envoie un signal clair de transparence et de fiabilité, une étape essentielle pour restaurer la confiance des investisseurs et des bailleurs de fonds internationaux ». Les années de surveillance renforcée avaient notamment provoqué un déclin des investissements de 6 à 7 %.
Cette annonce arrive à point nommé pour contrebalancer la récente dégradation de la note souveraine du Sénégal par l’agence Moody’s début octobre, qui avait abaissé le pays à la note B1 et placé sa perspective « sous surveillance ». Elle conforte également les autorités sénégalaises dans leurs efforts pour négocier un nouvel accord avec le Fonds monétaire international (FMI) et répondre aux besoins sociaux et économiques du pays.
À trois semaines des élections législatives prévues pour le 17 novembre, cette annonce pourrait aussi renforcer la position du président Bassirou Diomaye Faye et du Premier ministre Ousmane Sonko, qui pourraient mettre en avant cette réussite comme preuve de leur engagement pour la stabilité financière et la crédibilité internationale du Sénégal. Si cette avancée résulte d'efforts initiés par les gouvernements précédents, elle reflète néanmoins une continuité dans la politique de rigueur en matière de finances et de lutte contre les activités illicites.
En somme, le retrait du Sénégal de la « liste grise » est une bouffée d'air pour l'économie nationale et marque une étape décisive vers une plus grande stabilité économique, ouvrant des perspectives nouvelles pour les investisseurs et renforçant la capacité du pays à attirer des financements internationaux.